Voici un article que j'ai beaucoup apprécié, dans les colonnes du journal L'Orient Le Jour.com et que je retranscris dans son intégralité ci-dessous. Des idées, considérées comme non politiquement correctes sont exprimées ici avec talent et transparence et moi j'adore ça !
« La vraie bonté de l’homme ne peut se manifester en toute
liberté et en toute pureté qu’à l’égard de ceux qui ne représentent
aucune force. Le véritable test moral de l’humanité (le plus radical qui
se situe à un niveau tel qu’il échappe à notre regard), ce sont ses
relations avec ceux qui sont à sa merci : les animaux. Et c’est ici que
s’est produite la plus grande déroute de l’homme, débâcle fondamentale
dont toutes les autres découlent. »
(Milan Kundera, l’Insoutenable légèreté de l’être)
On peut tout à fait vivre au XXIe siècle et être soumis à
la barbarie la plus infâme : celle qui stipule que le fort massacrera le
plus faible, qu’il n’en fera qu’une bouchée, avant de passer au
suivant... On peut tout à fait commémorer certains holocaustes et fermer
les yeux sur moult génocides. L’humanité d’aujourd’hui est en plein
« double bind » : elle pense avoir sublimé les atrocités du passé
commises à l’encontre de certains peuples exterminés mais ferme les yeux
sur les massacres du présent. Elle dénonce, condamne d’un côté et
empêche toute action de l’autre. L’humanité est aussi une autruche qui
préfère exhumer les souvenirs plutôt que d’agir. C’est beaucoup plus
confortable d’interroger sa culpabilité a posteriori ! Et puis sa
mémoire est sélective : elle rend hommage à un peuple exterminé,
reconnaît a peine qu’un autre l’a été et garde en suspens les massacres
entre amis, un peu comme si éliminer son propre peuple était une affaire
de famille.
Oui, le monde dit civilisé assiste au drame syrien comme
s’il suivait un feuilleton de serie noire. Passivement, en zappant de
chaîne en chair. Ce monde-là a intégré l’horreur dans son quotidien,
jusqu’à la banaliser. C’est de la télé-réalité sanguinolente, dans
laquelle on assiste – presque sans ciller – à des images de cadavres
d’enfants mutilés, de femmes violentées, d’hommes défigurés, émasculés,
torturés. Oui, la normalité, c’est devenu « ça ». Aujourd’hui on tue
comme on respire. Mais on n’expie pas. L’impunité règne désormais en
maîtresse absolue sur un chaos sans précédent. Et si les animaux sont
exclus de toute relation de justice qui permettrait aux hommes d’avoir
une relation injuste de supériorité envers eux, que dire alors des
hommes-bétails qui vont chaque jour à l’abattoir ? Tout cela ne peut que
nous laisser un arrière-goût d’une fin d’un monde qui ne sera plus
jamais le même après que les vandales eurent achevé leur sale besogne.
Cit-gît l’humanité qui ne reposera désormais plus jamais en paix. Et
retour à l’âge de pierre, aux instincts primaires; à une dérive
honteuse. Avec un silence complice pour écho. Certaines personnes sont
probablement plus sensibles et plus réceptives aux signaux que leur
envoie leur conscience sur le bien et le mal... et je suis fière de
faire partie de celles-ci... Mieux encore, je serai honorée d’appartenir
au monde animal parce que les animaux ne sont ni cruels ni pervers,
eux...
Par Bélinda IBRAHIM, le 29 août 2012