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1 septembre 2012

Des animaux et des hommes

Voici un article que j'ai beaucoup apprécié, dans les colonnes du journal L'Orient Le Jour.com et que je retranscris dans son intégralité ci-dessous. Des idées, considérées comme non politiquement correctes sont exprimées ici avec talent et transparence et moi j'adore ça !


 « La vraie bonté de l’homme ne peut se manifester en toute liberté et en toute pureté qu’à l’égard de ceux qui ne représentent aucune force. Le véritable test moral de l’humanité (le plus radical qui se situe à un niveau tel qu’il échappe à notre regard), ce sont ses relations avec ceux qui sont à sa merci : les animaux. Et c’est ici que s’est produite la plus grande déroute de l’homme, débâcle fondamentale dont toutes les autres découlent. » 
 (Milan Kundera, l’Insoutenable légèreté de l’être) 

On peut tout à fait vivre au XXIe siècle et être soumis à la barbarie la plus infâme : celle qui stipule que le fort massacrera le plus faible, qu’il n’en fera qu’une bouchée, avant de passer au suivant... On peut tout à fait commémorer certains holocaustes et fermer les yeux sur moult génocides. L’humanité d’aujourd’hui est en plein « double bind » : elle pense avoir sublimé les atrocités du passé commises à l’encontre de certains peuples exterminés mais ferme les yeux sur les massacres du présent. Elle dénonce, condamne d’un côté et empêche toute action de l’autre. L’humanité est aussi une autruche qui préfère exhumer les souvenirs plutôt que d’agir. C’est beaucoup plus confortable d’interroger sa culpabilité a posteriori ! Et puis sa mémoire est sélective : elle rend hommage à un peuple exterminé, reconnaît a peine qu’un autre l’a été et garde en suspens les massacres entre amis, un peu comme si éliminer son propre peuple était une affaire de famille.
Oui, le monde dit civilisé assiste au drame syrien comme s’il suivait un feuilleton de serie noire. Passivement, en zappant de chaîne en chair. Ce monde-là a intégré l’horreur dans son quotidien, jusqu’à la banaliser. C’est de la télé-réalité sanguinolente, dans laquelle on assiste – presque sans ciller – à des images de cadavres d’enfants mutilés, de femmes violentées, d’hommes défigurés, émasculés, torturés. Oui, la normalité, c’est devenu « ça ». Aujourd’hui on tue comme on respire. Mais on n’expie pas. L’impunité règne désormais en maîtresse absolue sur un chaos sans précédent. Et si les animaux sont exclus de toute relation de justice qui permettrait aux hommes d’avoir une relation injuste de supériorité envers eux, que dire alors des hommes-bétails qui vont chaque jour à l’abattoir ? Tout cela ne peut que nous laisser un arrière-goût d’une fin d’un monde qui ne sera plus jamais le même après que les vandales eurent achevé leur sale besogne. Cit-gît l’humanité qui ne reposera désormais plus jamais en paix. Et retour à l’âge de pierre, aux instincts primaires; à une dérive honteuse. Avec un silence complice pour écho. Certaines personnes sont probablement plus sensibles et plus réceptives aux signaux que leur envoie leur conscience sur le bien et le mal... et je suis fière de faire partie de celles-ci... Mieux encore, je serai honorée d’appartenir au monde animal parce que les animaux ne sont ni cruels ni pervers, eux...

Par Bélinda IBRAHIM, le 29 août 2012